Santé

« L’aide à mourir » bientôt débattue à l’Assemblée

Longtemps boudé par les politiques, honnis par les religieux, le sujet de la «fin de vie» s’est tellement imposé dans la société française que le gouvernement a dû s’en emparer. Un projet de loi sera discuté à partir de lundi 27 mai.

Publié le 22 Mai 2024

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Dernière mise à jour le  22 Mai 2024  à  16h30.

Le projet de loi prévoit qu'un tiers pourra aider le patient à mettre fin à ses jours. DR: Adobe Stock.
Le projet de loi prévoit qu'un tiers pourra aider le patient à mettre fin à ses jours. DR: Adobe Stock.

Une « aide à mourir »: c’est ce que promet Emmanuel Macron, qui a fini par révéler au printemps la teneur de cette réforme-clé, qu’il avait promise dès sa campagne de 2017 et sans cesse reportée, ajournée, tant le sujet est sensible. Le texte adopté en commission des lois à l’Assemblée prévoit donc une aide au suicide, communément appelée « suicide assisté ». 

Une avancée considérable par rapport à la loi en vigueur, appelée Claeys-Leonetti, qui autorise seulement une « sédation profonde et continue jusqu’au décès » de personnes à quelques jours ou quelques heures de la mort, après une décision collégiale des soignants si le patient ne peut plus exprimer sa volonté.

Mais avec « l’aide à mourir », on est encore bien loin de l’euthanasie, autorisée en Belgique notamment, qui consiste à administrer volontairement un produit létal à un patient. Le dispositif imaginé par le gouvernement français se calque davantage sur ce qui existe en Suisse: un tiers pourra aider le patient à mettre fin à ses jours, en lui procurant, puis en lui préparant la dose mortelle. Ensuite, c’est le patient lui-même qui devra se l’administrer, sauf s’il n’est pas physiquement en incapacité de le faire, auquel cas il pourra demander l’aide d’un médecin, infirmier ou tiers de confiance.

Le texte divise profondément les politiques, mais aussi le corps médical, et les modifications apportées par la Commission spéciale à l’Assemblée ont accru cette division. 

Déjà, la modification des critères d’accès au suicide assisté par la Commission des lois a provoqué un schisme profond au sein de la majorité présidentielle: le projet final a remplacé, parmi les critères d’accès à l’aide à mourir, le fait que le patient devait avoir son pronostic vital engagé « à court ou moyen terme » par la notion de maladie « en phase avancée ou terminale ».  

Une modification voulue par le rapporteur Olivier Falorni (MoDem), mais qu’a déplorée la présidente de la Commission, l’ex-ministre Agnès Firmin le Bodo (Horizons). « On n’est plus du tout dans la même loi » a-t-elle regretté, craignant l’ouverture à « des personnes dont le pronostic vital serait engagé à long terme, qui peuvent avoir des souffrances physiques réfractaires, de demander l’aide à mourir ».

L’enjeu de renforcer les soins palliatifs

D’autres au contraire estiment que la loi ne va pas assez loin, puisqu’elle exclue la possibilité pour des personnes incapables de manifester leur volonté, comme les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, d’être aidées à se suicider sur la foi de directives anticipées rédigées en amont…

En première ligne pour appliquer cette loi, le corps médical est aussi très divisé sur cette question. En tête des opposants à la loi, Claire Fourcade, la médiatique présidente de la Sfap (Société française d’accompagnement et de soins palliatifs), « consternée » par le projet de loi, martèle que la priorité doit être donnée à ces derniers: « Aujourd’hui, en France, 500 personnes meurent tous les jours sans avoir eu accès aux soins palliatifs, alors qu’elles avaient besoin d’être soulagées », a-t-elle par exemple rappelé sur France Info.

Dans leur ensemble, les personnels soignants sont réticents à exercer un geste « pas anodin », qui n’est pas dans leur culture et leur formation, celui de donner la mort.

Le Collège de médecine générale, plus mesuré sur le projet de loi, qu’il ne rejette pas, met en avant, lui aussi, le besoin de «renforcer les soins palliatifs (personnels et financements)». C’est là que pourraient, éventuellement, entrer en ligne de compte des traitements par substances psychédéliques telles que celles étudiées actuellement, comme le raconte Mélissande Bry dans son enquête sur scène « Un dernier trip : les psychédéliques et la fin de vie »

Ces traitements permettent d’affronter les angoisses face à la mort et les questions existentielles qui en découlent. Or, l’objectif des soins palliatifs, rappelle la Sfap, est de « soulager les douleurs physiques et les autres symptômes, mais aussi de prendre en compte la souffrance psychique, sociale et spirituelle ».


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