Politique

[Replay] Extrême droite : la casse sociale

Découvrez l’enquête de Jean-François Poupelin sur « l’extrême droite : la casse sociale », révélée sur scène le 9 janvier.

Publié le 9 Jan 2025

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Dernière mise à jour le  15 Jan 2025  à  17h54.

Durant les dernières élections législatives, Marine le Pen, la cheffe de file des députés Rassemblement National (RN), haranguait : « Si vous voulez plus de social, votez RN ! »

Depuis sa prise de pouvoir en 2011, Marine Le Pen poursuit la « dédiabolisation » du parti d’extrême droite. D’abord, en masquant son antisémitisme par un appui à Israël. Puis, en se montrant plus social et préoccupé des plus fragiles. A l’époque, l’élue du Pas-de-Calais succède à son père Jean-Marie Le Pen, décédé ce 7 janvier, à la tête de ce qui s’appelait encore le Front national (FN).

Mais ce positionnement ne résiste pas à la réalité. Pendant l’examen des projets de loi de finance 2025, les députés RN ont avant tout défendu les plus riches. Ils ont par exemple rejeté la surtaxe exceptionnelle des entreprises et la taxation des patrimoines de plus d’un million d’euros.

Il y a encore plus parlant : les politiques menées au niveau local par les maires d’extrême droite. Contrairement à cette petite musique qui joue de plus en plus fort, cela fait en effet longtemps qu’on « a essayé » le RN, et ce dès 1995 avec les victoires du FN à Toulon, Vitrolles, Marignane et Orange.

Dix-sept villes sont aujourd’hui gérées soit par des majorités Rassemblement national, soit avec le soutien du parti ou celui de Reconquête, le parti du polémiste d’extrême droite Eric Zemmour.

Au-delà de ses trois piliers idéologiques – à savoir la baisse des impôts, le renforcement de la sécurité et la suppression des subventions aux associations jugées « communautaristes »-, ces maires partagent la même passion pour la casse sociale.

Pour Mediavivant, Jean-François Poupelin s’est rendu dans certaines villes qu’elle dirige, pour y étudier leurs politiques en direction de la petite enfance, de la jeunesse, d’offre de services publics, d’accompagnement des plus précaires ou encore de gestion du personnel.

Le choix s’est dirigé sur trois communes : Orange, Mantes-la-Ville et Perpignan.

Partie 1 : Orange, sous la dynastie Bompard

À Orange, cela fera 30 ans en juin prochain que Jacques Bompard a fait basculer la deuxième ville du Vaucluse, avec 30 000 habitants, à l’extrême droite. Ces trois décennies permettent de voir les effets sur le long terme de cette idéologie.

Jean-François Poupelin a enquêté sur la situation dans les cités de Fourches-Vieilles et de l’Aygues, après 30 ans de règne de la famille Bompard. Sur scène, il interviewe des témoins directs de la dégradation des services publics.

« La ville s’est transformée. Il n’y a plus de lien social. Tout ce qui se passe est au sud de la ville, pour des populations qu’on va qualifier de « blanches », déplore Brigitte Laouriga, fondatrice du centre social Pierre Estève dans le quartier de l’Aygues. Les laissés-pour-compte, les quartiers populaires (…) ont complètement été abandonnés. Il n’y a  plus de centres sociaux à Orange ».

Kamel Majri, directeur de Laissez les Fers, un chantier d’insertion installé dans le quartier périphérique de Fourches-Vieilles, regrette aussi le manque de soutien dans les quartiers populaires. « On a essayé de résister. On a créé une maison des services publics à un moment. (…) On y est arrivé plus ou moins bien mais, petit à petit, on s’est épuisé », explique-t-il sur scène.

Découvrir aussi : Le combat pour sortir des cités

Partie 2 : La génération perdue de Mantes-la-Ville

Mantes-la-Ville est la seule ville d’Ile-de-France à avoir basculé à l’extrême droite.

L’ancien maire RN, Cyril Nauth, n’est resté qu’un mandat, entre 2014 et 2020. Mais ces six années lui ont suffi pour assécher des services publics et mettre à mal un tissu associatif souvent précieux pour les plus fragiles.

Mantes-la-Ville, c’est une petite cité-dortoir de 20 000 habitants posée au nord-ouest de Paris avec une forte population ouvrière et immigrée. Les associations ont vu les subventions de la mairie se réduire de façon drastique, voire disparaître comme pour le FC Mantois, un club de foot. D’autres structures n’ont plus eu la possibilité d’utiliser des locaux municipaux comme la Ligue des droits de l’homme.

Dans cette partie, sur scène, la politologue Christèle Marchand-Lagier, spécialiste du vote d’extrême droite et maîtresse de conférence à l’université d’Avignon, explique que des pouvoirs locaux d’extrême droite vont accentuer le désengagement de l’état, créant une hiérarchie entre les populations, à Mantes-la-Ville comme dans les autres villes gérées par l’extrême droite.

« Vous avez des citoyens qui sont distingués comme étant des citoyens supérieurs dans ces communes du RN », analyse-t-elle. Christèle Marchand-Lagier expose également un désengagement des forces politiques dans certaines communes d’extrême droite : « A Orange, il n’y a plus de gauche, il n’y a plus de droite. Dans le Nord du Vaucluse, on a le choix entre l’extrême droite et l’extrême droite ».

Partie 3 : Perpignan, la purge sociale

Perpignan a basculé en 2020. C’est la plus grande ville gérée par le Rassemblement national.

Elle est dirigée par Louis Aliot, vice-président du RN, un des moteurs de la « dédiabolisation » du parti fondé par Jean-Marie Le Pen, et ancien compagnon de Marine Le Pen. Il a aussi été député européen, ce qui lui vaut d’ailleurs d’être inquiété dans l’affaire des assistants parlementaires du FN. Il risque 18 mois de prison, dont six fermes, et trois ans d’inéligibilité avec exécution provisoire. Il pourrait donc devoir rendre son écharpe de maire et ne pas pouvoir se représenter en 2026.

Perpignan est aussi une ville extrêmement pauvre, avec neuf quartiers politique de la ville.

« Je pense que le maire [Louis Aliot, ndlr] a le souci de marier le respect des grands équilibres financiers, sinon on lui reprocherait s’il appauvrissait la ville, et, en même temps, de maintenir à niveau des politiques publiques qui sont demandées. Vous dites la sécurité, c’est aussi ce qui est demandé. (…) La politique sociale ne va pas se réduire à ça, mais on a quand même une responsabilité du quotidien qu’il faut absolument préserver », défend Philippe Mocellin, le directeur général des services à la mairie de Perpignan.

Des associations intervenant en soutien des plus démunis font pourtant les frais de cette politique.  Dans cette partie, Jean-François Poupelin a enquêté sur la fragilisation de structures comme le Fil à métisser qui soutient des familles gitanes dans le quartier Saint-Jacques, ou le club sportif du Haut Vernet.

Les maires ou anciens maires d’extrême droite de Mantes-la-Ville et Orange, n’ont pas répondu aux sollicitations de Mediavivant.

Une enquête de Jean-François Poupelin

Découvrir l’enquête en intégralité ici


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