Santé

Ces médecins méditerranéens à la rescousse des hôpitaux français

Sans les médecins du bassin méditerranéen, le système de santé français ne tournerait pas. Pourtant, leurs conditions sont plus que précaires. Une enquête de Leïla Beratto et Coline Charbonnier à retrouver en vidéo.

Publié le 18 Juin 2024

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Dernière mise à jour le  25 Juin 2024  à  16h30.

Des milliers de médecins,  appelés en renfort de Méditerranée, permettent à notre système hospitalier français de tenir le coup, dans un équilibre fragile. Cette enquête de Leïla Beratto et Coline Charbonnier révèle la précarité et les inégalités de traitements que ces médecins qualifiés subissent en retour, en particulier les médecins méditerranéens. Jusqu’à être expulsés pour certains, après des années de bons et loyaux services.

L’enquête sur les médecins non européens en France interroge face à l’actualité politique, depuis la dissolution de l’Assemblée nationale. Quelle place auraient ces médecins si l’extrême-droite parvenaient à se hisser au pouvoir ?

La sociologue spécialiste des migrations, Francesca Sirna, est sur scène pour répondre, et aussi pour comparer avec l’Italie, dirigé par l’extrême-droite.

Cette enquête est à retrouver sur notre chaîne YouTube.

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Au service des hôpitaux publics

Selon l’ordre des médecins, 7% des médecins actifs en France aujourd’hui ont obtenu leur diplôme en dehors de l’Union européenne. Cela représente plus de 16 000 personnes. Cette part est en augmentation constante. Les médecins qui ont validé leur équivalence  viennent de Tunisie, de Syrie ou du Maroc, et, pour plus d’un tiers d’entre eux, d’Algérie. Au quotidien, certains hôpitaux indiquent compter jusqu’à 20%, parfois 40% de médecins étrangers dans leurs services

 « Je suis arrivée en France en 2012 mais à cette époque-là, je ne m’attendais pas à ce que le parcours soit aussi difficile que ce que j’ai rencontré par la suite», explique Kahina Hireche, arrivée dans un désert médical en Normandie en 2012. Elle n’a pas réussi à trouver un travail avec son diplôme de médecin algérien. Elle a donc fait des études d’infirmière et avec ce diplôme, elle a été embauchée dans un service de psychiatrie.

 Des médecins qui répondent aux besoins urgents

Comment sont-ils recrutés ? Directement par les hôpitaux en général. Des offres sont régulièrement publiées par les chefs de service. Les services de ressources humaines constituent des dossiers de recrutement par spécialité et par pays dans lesquels ils peuvent puiser en cas de besoin et les médecins envoient eux-mêmes des candidatures spontanées. 

« J’ai vu la dégradation du système de santé français, une hémorragie de médecins notamment en psychiatrie », constate Kahina Hireche dont le service manque encore de médecins et d’internes. « Dans mon établissement, chaque année, il y  a une fermeture d’au moins un service dû au manque de médecins ».

Des statuts précaires au cœur d’enjeux politiques 

Les différents statuts des médecins étranger sont précaires et le processus de sélection est opaque. La réalité des hôpitaux français fait que le système censé aider à former des médecins étrangers est devenu un système de recrutement. 

En 2021, il est donc décidé de régulariser tous les médecins qui ont travaillé pendant le Covid, et de ne laisser en place désormais qu’un seul moyen de titularisation : le passage des EVC.  La loi de régularisation appelée « Stock » devait régulariser 5 000 personnes, via une commission.  Mais il y a eu 15% de rejet. Et ces 15% continuent à travailler car le besoin est énorme. 

Les modifications réglementaires décidées par le ministère de la Santé changent trop vite, pour que les préfectures suivent.

La conséquence ? C’est que faute de pouvoir justifier de leur emploi, plusieurs d’entre eux sont alors visés par des Obligation de quitter le territoire français, les OQTF. 

« La situation administrative des médecins étrangers en France n’a jamais été aussi chaotique que depuis deux-trois ans. Parce que les médecins étrangers en France ont vu passer plusieurs décrets, plusieurs réformes de statuts, de rémunérations, de grilles, qui ont fait que leur précarité s’est vu décuplée », témoigne Kahina Hireche, qui est également la représentante du Syndicat SOS Padhues. Sur scène, la sociologue Francesca Sirna analyse la précarité de ces médecins en France, et aussi en Italie qui a recours à des médecins cubains par exemple. Elle conclut par les difficultés à témoigner sur ce sujet. Il y a un tabou  que ces médecins n’ont pas toujours envie de montrer :   « cette dévalorisation, ce déclassement, d’être médecin et payé 1 800 euros. Ce n’est valorisant pour personne. »


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