Inégalités dans la santé
Le laboratoire Servier sur le banc des accusés
Plus d’un millier de personnes sont décédées à cause du Mediator. 70% des victimes sont des femmes. Le procès en appel contre le laboratoire Servier s’est achevé en juin. La décision sera rendue le 20 décembre.
Près de 15 ans après l’interdiction à la vente du Mediator, la procédure judiciaire contre le laboratoire Servier, deuxième groupe pharmaceutique français, est toujours en cours. Ce dernier a commercialisé pendant plus de trente ans cet antidiabétique, principalement prescrit comme coupe-faim. Son efficacité reposait sur une molécule proche des amphétamines. Selon les estimations, plus d’un millier de personnes sont décédées de maladies cardiaques causées par le médicament. C’est l’un des plus gros scandales sanitaires en France, avec l’affaire du sang contaminé.
La justice doit trancher : le groupe Servier avait-il conscience de la toxicité du médicament qu’il commercialisait ? Les laboratoires et Jean-Philippe Seta, l’actuel PDG, avaient fait appel du premier procès qui s’était tenu entre septembre 2019 et juillet 2020 après une instruction d’une dizaine d’années. Jacques Servier, le patron du laboratoire éponyme, étant décédé en 2014, c’était son ancien bras droit, Jean-Philippe Seta qui avait pris place sur le banc des accusés. Face à lui, 6 657 personnes s’étaient alors constituées parties civiles.
Après plus de 500 heures d’audience, les juges avaient alors déjà condamné le laboratoire Servier pour « tromperie aggravée » et « homicides involontaires », reconnaissant la responsabilité directe de l’industriel.
En juin 2023, en appel, au terme de cinq mois d’audience, le parquet a requis une peine plus sévère qu’en première instance : une amende de 13,5 millions d’euros et « la confiscation du capital » lié au médicament d’une valeur estimée à 182 millions d’euros.
À l’encontre de Jean-Philippe Seta, 69 ans, ex-directeur général de Servier, l’accusation a réclamé cinq ans d’emprisonnement dont deux ferme, aménageables avec un bracelet électronique, et une amende de 200.000 euros.
Le groupe pharmaceutique a plaidé sa bonne foi. « Je veux répéter aux victimes et leurs familles (…) qu’il n’y a jamais eu de volonté, d’intentionnalité, de conscience » dans la dissimulation de la toxicité du médicament, a assuré l’ancien numéro 2. La décision sera rendue le 20 décembre 2023.
Margaïd Quioc