Inégalités dans la santé

Affaire Naomi Musenga : l’écoute du Samu en question

Une jeune femme d’origine camerounaise décède en 2017 après avoir appelé les urgences cinq heures plus tôt. Des stéréotypes sur les personnes africaines peuvent expliquer ce retard de prise en charge fatal.

Publié le 2 Oct 2023

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Dernière mise à jour le  2 Oct 2023  à  9h08.

Naomie Musenga décède en 2017. La non prise en charge à temps par les urgences est pointé du doigt. DR
Naomie Musenga décède en 2017. La non prise en charge à temps par les urgences est pointé du doigt. DR

La mort de Naomi Musenga aurait-elle pu être évitée ? Dans la nuit du 29 décembre 2017, cette jeune femme de 22 ans, mère d’une petite fille d’un an, décède d’un accident vasculaire abdominal à l’hôpital de Strasbourg. Cinq heures auparavant, elle avait appelé les urgences.

Un enregistrement rendu public en avril 2018 par le journal alsacien Heb’di, révèle l’échange entre Naomi et l’opératrice qui la prend en charge. 

. Naomi – Je vais mourir.

. Opératrice – Oui, vous allez mourir certainement un jour, comme tout le monde. OK ?(…) 

. N – J’ai très mal.

. O – Oui, et où ?

. N – J’ai très mal au ventre, partout.

. O – Oui ben vous appelez SOS Médecin. Voilà, ça je peux pas le faire à votre place. Au revoir.

Ce n’est qu’après un deuxième appel que la jeune femme est emmenée à l’hôpital. Selon un rapport de l’IGAS, Naomi Musenga aurait subi 2h20 de retard dans sa prise en charge .

Une information judiciaire est en cours «pour non assistance à personne en danger» contre l’opératrice, mais également pour homicide involontaire contre X. L’enquête tente de déterminer la responsabilité de l’hôpital de Strasbourg.

Suite aux révélations de Heb’di, des militants antiracistes ont pointé le poids du «syndrome méditerranéen», un stéréotype encore peu documenté par les sociologues. Il pousse les soignants à croire que les personnes noires ou arabes, en particulier les femmes, dramatisent leurs symptômes. Un mécanisme inconscient qui a pu pousser l’opératrice à ne pas prendre au sérieux les plaintes de Naomi. D’origine camerounaise, elle s’exprimait avec un léger accent.

Le manque de moyens et de personnel formé au sein du service de régulation des urgences est également évoqué. Selon un élément de l’enquête révélé par le magazine Complément d’enquête, la régulatrice avait fait part de sa lassitude et de sa fatigue à ses supérieurs. Elle assure avoir été formée «sur le tas» et avoue «faire de l’abattage» quand elle prend des appels.

Suite à cette affaire, le ministère de la santé a mis en place en septembre 2019 un programme de formation pour les opérateurs et opératrices du Samu. L’enquête sur la mort de Naomi Musenga est toujours en cours.

Margaïd Quioc


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