1983-2023
40 ans de la Marche : une page d’Histoire encore ouverte
L’hommage de Marseille à la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983 a révélé une émotion et une colère toujours intactes chez les militants.
La Marche pour l’égalité et contre le racisme aura bientôt son nom gravé à Marseille. Pas une simple rue mais une avenue. Le lieu choisi sera dévoilé dans les prochains mois. Le moment est venu d’honorer « la marche des opprimés » et de combattre les « sillons de la division » qui renaissent, selon les mots du maire de la ville, Benoît Payan, lors d’une cérémonie au palais du Pharo dimanche 15 octobre.
« La République ne peut pas, ne peut plus, ne doit plus, laisser prospérer en son sein le terreau fertile du racisme, de l’antisémitisme, de la haine des musulmans, des discriminations », a affirmé l’élu. Le 15 octobre 1983, les Marcheurs étaient partis de Marseille jusqu’à Paris, pour dénoncer le contexte de crimes racistes et de violences policières visant en premier lieu la population algérienne.
Après la réception, les Marcheurs de l’époque ont inauguré leur exposition au musée d’Histoire de Marseille « Là où il y a eu oppression, il y a eu résistance », qui s’achèvera le 15 janvier 2023. Pour Hanifa Taguelmint, une figure emblématique de la Marche, il était temps d’inscrire cette mobilisation non-violente « dans le roman national de la France ».
Une lutte à poursuivre
« Les éclaireurs », comme les surnomme Faïza Guène, romancière et marraine de cette célébration, sont là pour passer le flambeau aux générations suivantes. « Nous sommes les enfants de la Marche », raconte la trentenaire devant le parterre d’invités lors de la cérémonie. Aujourd’hui encore, « il est impensable que nos droits soient si fragiles », regrette l’auteure.
Présent dans la salle, Christian Delorme, un prêtre « très marqué » par le discours de Martin Luther King « I have a dream », avait initié cette mobilisation non-violente avec le jeune Toumi Djaïdja qui a survécu à la balle d’un policier aux Minguettes, à Lyon, en 1983. Il rappelle les valeurs de cette « marche républicaine » pour « une société de paix ».
Au micro, Lena Taguelmint, 28 ans, confie les difficultés dans son parcours en tant que jeune perçue comme « femme, berbère, algérienne, marseillaise ». Elle dénonce le «problème systémique» du racisme et les « inégalités structurelles » toujours d’actualité. «La honte n’est pas un sentiment à avoir face à mes racines», lance-t-elle. Sous les yeux de sa mère Hanifa, qui lui succède au pupitre pour conclure : « On est désolé, on n’a pas terminé la lutte ».
Daphné Gastaldi