Santé des femmes

Sarah Sissoko : « les fausses couches sont de vrais traumatismes »

A 29 ans, Sarah Sissoko témoigne de plusieurs fausses couches, alors que l’Assemblée nationale a voté une loi pour mieux accompagner les femmes dans sa situation.

16 Mar 2023
Sarah Sissoko. Crédit : DR
Sarah Sissoko. Crédit : DR

Sur son avant-bras gauche, elle a fait tatouer, sur une ligne parallèle aux veines, deux étoiles et deux étincelles qui se terminent par une larme, pour marquer «au fer rouge» ses quatre fausses couches. 

La fausse couche, qui met fin à 15% des grossesses, est un phénomène banal pour les médecins, mais pour ceux qui le vivent, c’est «un vrai traumatisme», assure Sarah Sissoko. Au soir de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, l’Assemblée nationale a voté à l’unanimité une proposition de loi pour mieux prendre en charge les femmes après une fausse couche, avec un accompagnement psychologique et un arrêt maladie sans jour de carence. Une manière d’enfin reconnaître ce «drame intime», selon les mots du ministre de la Santé.

Pour Sarah, employée d’assurance dans les Yvelines, tout avait bien commencé : après plusieurs mois d’essais infructueux, en 2020, elle tombe enceinte, en pleins préparatifs de son mariage. «J’étais sur mon petit nuage quand, le lendemain de mon mariage, j’ai perdu le bébé», raconte-t-elle. Un premier choc qu’elle et son mari encaissent en se lançant aussitôt une procédure de FIV (fécondation in vitro), sur les conseils d’une gynécologue. 

Après sa première ponction d’ovocytes, Sarah se réveille de l’anesthésie générale «sonnée, avec des douleurs». Mais très vite arrivent «les bonnes nouvelles: un embryon de très bonne qualité s’est formé». Cet «ascenseur émotionnel», comme elle dit, Sarah n’a pas fini de l’emprunter…

Des piqûres, des bleus et des larmes
 

Elle est enceinte de 8 semaines quand elle se présente pour sa première échographie, seule car son mari souffre du Covid. «J’avais mis une belle robe à fleurs, j’étais heureuse». Mais l’échographiste reste silencieuse : l’embryon est «trop petit», et n’a «aucune activité cardiaque». Envoyée aux urgences pour avorter, Sarah s’effondre dans le couloir.

La jeune femme entre ensuite en «mode robot» dans un nouveau processus de FIV, avec plus de corticoïdes et d’anticoagulants, «sans même laisser passer un cycle». Sur son compte Instagram, son «journal intime» qui l’a «aidée à tenir», elle publie cette année de montagnes russes en photos : les boîtes de seringues par dizaines, les bleus engendrés par les piqûres, les tests de grossesse positifs puis, quelques jours plus tard, les taux de Bêta-HCG qui s’effondrent. 

Quand elle est enceinte, elle va chaque jour au laboratoire se faire faire une prise de sang à ses frais, pour s’assurer du bon déroulement de la grossesse, à tel point que la laborantine ne sait plus «où piquer». «Je me disais que j’étais une guerrière, que j’étais forte, mais j’étais obsédée par ce bébé, je ne vivais plus, j’ai pris 15 kilos…» dit-elle aujourd’hui, après quatre fausses couches en un an : «je pense que j’étais tellement mal que je n’étais pas en état d’accueillir un enfant, avec le recul».

En 2022, Sarah arrête tout, et retrouve peu à peu son corps, et sa vie de couple. On lui diagnostique une endométriose profonde, et elle est désormais suivie par un professeur généticien. «Mon cas intéresse les médecins, maintenant», dit-elle dans un sourire. Elle pense retenter d’avoir un enfant en 2023, mais se sent «plus apaisée». Le plus dur pour Sarah : «être considérée comme une femme sans enfant, alors que j’ai quatre bébés au ciel».

La rédaction


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