Marche des fiertés

Bruno : « C’était un monde complètement inconnu » 

Après avoir appris la transidentité de leur enfant, Bruno anime des groupes de paroles pour les familles concernées.

8 Juin 2023
Bruno, parent d'un enfant transgenre. Crédit : DR
Bruno, parent d'un enfant transgenre. Crédit : DR

« Faut qu’on parle ».  Un jour de 2017, Bruno, et sa femme Magali*  écoutent leur enfant, fille à l’état civil, leur annoncer sa transidentité. « Je suis un garçon ». Ils sont stupéfaits. Depuis quelque temps, « il avait sérieusement raccourci ses cheveux ». Un signe compris seulement a posteriori.

« Je suis allé voir sur Wikipédia ce que ça signifiait être trans », raconte le père, derrière ses lunettes rectangulaires. L’ingénieur, alors âgé de 57 ans, n’avait aucune notion pour comprendre la situation des personnes transmasculines, qui ne se vivent pas comme en accord avec le genre assigné à la naissance et opèrent une transition pour devenir homme. Aujourd’hui, Bruno anime des groupes de paroles pour les proches d’enfants trans, au sein de l’association OUTrans. Il y a deux réactions communes au moment de la révélation : « ça nous est tombé dessus comme une météorite sur la tête» ou «on s’en doutait depuis un moment ». Pour Bruno et Magali,  c’était le premier cas. « C’était un monde complètement inconnu pour moi », explique Bruno. Dans leur famille, « il n’y a pas eu de rejet, ni de réactions violentes. Peut-être des personnes déroutées », poursuit-il. 

Leur enfant a un peu plus de 17 ans et entreprend seul les formalités pour changer d’identité et débuter un traitement hormonal. Bruno signe les papiers, lui apporte même des produits adéquats pour le traitement lorsque leur fils part s’installer à l’étranger. « J’avais vu les ordonnances et je savais qu’il faisait ça dans les clous », se remémore-t-il.

« Mon fils est trans, et alors ? »

L’évolution physique est une autre étape. « Le traitement masculinisant a été plutôt rapide dans son cas, se souvient-il. C’est un peu un choc ». Sur les albums de famille, ils décident de changer les étiquettes avec le prénom, « surtout qu’il avait un prénom très féminin avant ». Il leur faudra du temps pour apprendre à dire « il », à ne plus buter sur sa nouvelle identité. « Au début, je pensais ne jamais y arriver. On se force, explique Bruno. Aujourd’hui, on n’y pense plus, c’est un non-sujet ».

« J’ai eu une séance de supervision avec un psy, avant d’animer à mon tour le groupe de parole à OUTrans », détaille Bruno. Chaque mois, il a entre 20 et 50 personnes par séance. Le couple milite à deux, court les manifestations avec des pancartes «Mon fils est trans, et alors ?». Ils se rendent chaque année à la marche ExisTransInter et citent des références entrées dans la culture populaire comme le film «La vie d’Adèle», le chanteur Redcar ou la BD Transitions – journal d’Anne Marbot. Engagés, ils font tout de même attention «à ne pas parler que de choses trans» avec leur fils, qui ne souhaite pas être réduit à cette seule identité.

« Le chemin est long », ajoute Magali, qui se rappelle avoir eu besoin d’un an et demi pour s’adapter. « Chaque enfant est différent, chaque situation est différente », insiste Bruno. Le 24 juin, à Paris, ils seront tous les deux à la marche des fiertés.

Daphné Gastaldi, journaliste

*Les prénoms ont été modifiés à la demande des témoins.


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